Voulez-vous créer un texte avec un atelier d'écriture en ligne ?
Dimanche, après notre marche, je cherchais sur Internet des renseignements sur la trace de Solitude quand de lien en lien (en gros : trace-esclavage-histoiresenchemin) je suis arrivée à "La petite fabrique des écritures" et j'ai testé.
Cela fonctionne comme un jeu d'écriture classique avec des phrases-amorces (proposées en amont ) pour chaque paragraphe et des mots (choisis par soi-même avant le jeu) à insérer dans le texte. Il faut ne pas trop réfléchir, on écrit par associations d'idées, guidé par les contraintes. Le hasard y a cependant une grande part car on écrit par paragraphe en ignorant ce qui précède. En ce qui concerne la cohérence, le dispositif a des failles parce que les phrases-amorces peuvent être à des temps différents ou bien encore appartiennent à un récit à la 1ère ou à la 3ème personne mais on peut peaufiner son texte à la fin. Après avoir vu le résultat, j'ai laissé mon texte final tel quel avec des décrochages dans le point de vue de la narration, le texte s'apparentant plus à de la prose poétique .
Ce jeu d'écriture se fait en une demi-heure environ.
Voici mon texte, à lire plutôt après votre propre jeu pour conserver un effet de surprise.
Les rives oubliées
La lune était si belle ce soir-là dans sa lumineuse plénitude. On y distinguait des étranges montagnes, des pics et des cratères et peu s'en fallut que la tête ne m'en tournât. Les vents nocturnes s'étaient levés et avaient chassé les derniers nuages. On entendait les rumeurs de la fête et les paroles des chansons arrivaient comme des vagues, tantôt étouffées, tantôt avec une précision étonnante. Elles chantaient les printemps d'amour et d'héroïsme, ceux qui font sourire les filles et grandir les garçons, ceux qu'on rêve de garder éternellement quand on a vingt ans.
Le bateau suit le chenal pour partir vers d'autres rives. Point besoin de capitaine, il suit l'humeur du crépuscule et des vents oublieux qui l'emporteront dans leurs dérives chagrines. Solitaire, il chemine sans escales, guidé par les rêves des enfants , poussé par le vent nu de l'éternité.
Depuis les falaises aux contours fatigués par l'océan sculpteur, les archipels fragiles écrivent leurs histoires d'insectes solitaires.
Là-bas, peut-être, aux confins de l'horizon se trouve le port d'automne aux feuilles indécises. Là-bas la terre ferme, la terre qui pourra se recouvrir d' une nouvelle floraison.
Il n'aurait pas jeté un cri, il aurait dompté son impatience comme il l'avait fait durant toutes ces années de cendre. Il aurait juste senti le goût salé de la mer toute proche tandis que son coeur se serait remis à battre. Et puis, de sa bouche amère, il aurait laissé s'échapper le papillon de sa pensée, un battement d'ailes de paroles, tout ce que les années avaient enfoui profondément en lui.
Je me suis mis à fredonner ces anciens refrains qui parlent de désirs, d'oubli et de regrets. Je me suis remémoré les danses endiablées et je n'ai pas eu peur de la statue de pierre. Les arbres pleins d'oiseaux muets et de singes se sont réveillés et la forêt toute entière a frissonné sous les étoiles.
Les phrases-amorces que j'ai utilisées pour écrire les différents paragraphes sont :
"Quel beau quadrille : un peu plus et je m'envolais."
"Le ciel passe lentement dans le rectangle de la porte ouverte."
"La mer est ce que je ne vois pas."
"Il l'aurait regardée arriver vers lui, la revenante du chemin de pierres."
"Quant à moi j'ai déjà changé d'attelage et je suis reparti le coeur plus léger."
La première phrase est extraite de Ton beau capitaine de Simone Schwarz-Bart, les 3 suivantes de L'homme assis dans le couloir de Marguerite Duras et la dernière de Léon Tolstoï cité par Victor Chklovki dans Technique du métier d'écrivain .
Pour comprendre le processus vous pouvez replacer ces phrases dans l'ordre devant chaque début de paragraphe indiqué par la majuscule en bleu.
Il fallait aussi insérer 5 couples de noms communs, 5 groupes nominaux et 5 noms communs choisis au préalable. Les noms qui étaient à placer sont indiqués en gras.
J'ai emprunté à des poètes les GN : "printemps d'amour et d'héroïsme", "vent nu de l'éternité", "port d'automne aux feuilles indécises", "battement d'ailes de paroles" et "arbres pleins d'oiseaux muets et de singes", ce qui peut expliquer la tonalité qu'a prise mon texte. Je remercie en particulier Guillaume Apollinaire.
Depuis les falaises aux contours fatigués par l'océan sculpteur, les archipels fragiles écrivent leurs histoires d'insectes solitaires.
Là-bas, peut-être, aux confins de l'horizon se trouve le port d'automne aux feuilles indécises. Là-bas la terre ferme, la terre qui pourra se recouvrir d' une nouvelle floraison.
Il n'aurait pas jeté un cri, il aurait dompté son impatience comme il l'avait fait durant toutes ces années de cendre. Il aurait juste senti le goût salé de la mer toute proche tandis que son coeur se serait remis à battre. Et puis, de sa bouche amère, il aurait laissé s'échapper le papillon de sa pensée, un battement d'ailes de paroles, tout ce que les années avaient enfoui profondément en lui.
Je me suis mis à fredonner ces anciens refrains qui parlent de désirs, d'oubli et de regrets. Je me suis remémoré les danses endiablées et je n'ai pas eu peur de la statue de pierre. Les arbres pleins d'oiseaux muets et de singes se sont réveillés et la forêt toute entière a frissonné sous les étoiles.
Les phrases-amorces que j'ai utilisées pour écrire les différents paragraphes sont :
"Quel beau quadrille : un peu plus et je m'envolais."
"Le ciel passe lentement dans le rectangle de la porte ouverte."
"La mer est ce que je ne vois pas."
"Il l'aurait regardée arriver vers lui, la revenante du chemin de pierres."
"Quant à moi j'ai déjà changé d'attelage et je suis reparti le coeur plus léger."
La première phrase est extraite de Ton beau capitaine de Simone Schwarz-Bart, les 3 suivantes de L'homme assis dans le couloir de Marguerite Duras et la dernière de Léon Tolstoï cité par Victor Chklovki dans Technique du métier d'écrivain .
Pour comprendre le processus vous pouvez replacer ces phrases dans l'ordre devant chaque début de paragraphe indiqué par la majuscule en bleu.
Il fallait aussi insérer 5 couples de noms communs, 5 groupes nominaux et 5 noms communs choisis au préalable. Les noms qui étaient à placer sont indiqués en gras.
J'ai emprunté à des poètes les GN : "printemps d'amour et d'héroïsme", "vent nu de l'éternité", "port d'automne aux feuilles indécises", "battement d'ailes de paroles" et "arbres pleins d'oiseaux muets et de singes", ce qui peut expliquer la tonalité qu'a prise mon texte. Je remercie en particulier Guillaume Apollinaire.
8 commentaires:
Bon, voilà ce que j'ai pondu, c'est de saison...
Dans sa jeunesse, dans sa folie son coeur si blanc s'affolait le temps d'une drache; comme un bousier attiré par un tableau le sable s'épandait le long de son profil perdu car comment une jeune fille pourrait donner corps à son infantilité, coquillage sans substance répondant à mon rendez vous. Sans la fête nationale, l'incencie ne couverait pas; sans la berçeuse lancinante, l'humeur ne s'apaiserait pas: je sais quel spleen vous étreint les journées de pluie telle une île ephémère entourée d'un océan de délicatesse
J'ai cherché "drache" dans le dictionnaire : du néerl. "pleuvoir à verse" : pluie battante, averse.
C'est donc bien belge ?... et de saison !
Et alors ? Pas d'autres essais ?
En tout cas, bravo à Tiyel pour sa contribution !
Je me suis lancée mais mon texte est très très orienté, j'ai essayé de laisser le hasard faire mais c'était peine perdue. De plus je suis trop cartésienne pour ne pas mettre de lien entre mes paragraphes (sauf un !)
La petite fabrique des écritures de Amélie
Il ne voit que le parachute dans le ciel. Qui peut bien être sous cette voile ? Un sportif c'est sur, d'orient ou d'occident, il ne sait pas mais ici il n'y a pas que l'eau de la lune qui tombe du ciel.
Les sensations rencontrées en chute sont indéfinissables, il faut le faire pour savoir ; pour savoir pourquoi les oiseaux chantent... La première histoire de chute est aussi la plus ancienne, celle d'Icare qui s'en est brulé les ailes.
Ce sont les Championnats du Monde de parachutisme et il fait partie des rares à pouvoir découvrir ce sport durant cet évènement. Avec son moniteur, il est dans l'avion et il attend le moment où la porte va s'ouvrir. Il devra prendre la pose à la porte, une pose éphémère dans le vent avant de partir dans le vide. Il n'arrive plus à penser, à réfléchir ; le moniteur accroche les liaisons qui vont les garder collés jusqu'au sol, lui il regarde les gestes de ce dernier comme hypnotiser comme ailleurs.
Ecrire mais pour qui ? Pour sa famille, pour son équipe, pour soi aussi. Ecrire pour être lu par qui, quand et où ? Ecrire c'est prendre du temps, pour penser, réfléchir mais aussi se retrouver avec soi même. Faire fondre le temps d'une page, la carapace de bronze qui nous entoure. Ecrire ce n'est pas la partie animale qui est en nous, cet instinct de l'ours qui nous pousse à remonter le courant pour chercher dans les rapides les meilleurs saumons, mais c'est passer des jours et des nuits, somnambules, à taper sur une machine et aligner des lignes...
L'amour qu'il portait à cette fille n'avait plus d'importance. Ces délices ailées qu'il partageait maintenant avec ferveur, replissaient ses pensées.
Gros bisous
Amélie
Salut Amélie,
Nous savons tous que tu sais te lancer! Je vois que tu as pris le temps d'écrire entre 2 sauts.
Tu ne t'es pas brûlé les ailes, peut-être grâce à l'eau de la lune, mais tu nous reviens médaillée des championnats du Monde ! Encore bravo à la Team Deep Blue et merci d'avoir partagé avec nous ces "délices ailées"...
A qui le tour ?
Bonjour la famille. Voici ma création :
L'usage est que tout le monde le remarque rapidement Cela rappelle la terre d'ombre brûlée que le poète a décrit dans son livre Cela peut faire immédiatement penser à un voyage qui fut heureux Heureux car même si il ne rapporta pas d'or et d'argent, il porta chance comme un trèfle à quatre feuilles C'est la présence du temps qui me fera revenir Il fut comme la muse avec ses délices ailés qu'on a pu découvrir au musé Elles seront balayées par le mistral et permettront aux couples de se retrouver Cela est arrivé à tous les peuples marquants même devant un avenir aussi sombre que le café On se retrouvera comme le chat et sa solitude à attendre le retour de son maitre Mais celui-ci va bientôt rentrer par les chemins de sable et l'animal recommencera son manège
Bravo, Stéphane, pour ta création !
Es-tu parti en vacances en Italie ou dans le sud pour évoquer la terre d'ombre brûlée, le mistral et les chemins de sable ?
Et qui prendra la suite ?
Voici le texte que m'a envoyé un autre Stéphane. Merci à lui.
Confession du vampire des embouchures
Débarrassé de tout cet amas de souvenirs improbables accumulés au cours des ans, son esprit était comme une chambre noire, obscur et secret, mais prêt à recevoir le don de la lumière pour le fixer à jamais sur le papier.
Et chaque fois, pris de colère, il sautait de son lit et renversait sa table de chevet. Et chaque fois le corps trempé d'eau de lune et l'âme sombre il revêtait sa cape de vampire et reprenait son errance . Mi-homme mi-poisson, il échoua au coeur de Venise où un prêtre aux yeux exorbités de terreur reçut en se signant sa confession. Là, il était lui semblait-il enfin à l'abri, recroquevillé comme un foetus dans sa nuit utérine à l'ombre du confessionnal . A l'arbre de ramifications qui traçait en creux l'immensité de ses propres béances , il offrit le ciel dans un jardin chinois et entre les branches de son récit installa de fragiles passerelles, car il était lui-même devant cette oeuvre dont il avait déjà oublié le commencement, désemparé comme le marin portugais sans carte ni boussole balloté par les mascarets à l'embouchure de l'Amazone. Et au détour d'une île de mangroves jusque-là dissimulée par la nuit il découvrit, leurs ossements affleurant sur le sable du rivage, tous les peuples manquants si souvent mentionnés dans le Livre.
Enregistrer un commentaire