vendredi 30 janvier 2009

Où va-t-on ?


Le blocage se poursuit

C'est maintenant le 11ème jour de grève reconductible. La situation de blocage continue et devient très difficile à gérer. Les petites et moyennes entreprises qui ne peuvent plus travailler n'ont pas de trésorerie pour verser leur salaire du mois de janvier à leurs employés.
Hier, la télévision montraient des éleveurs qui manquent d'aliments pour leurs animaux. Un producteur de volailles qui venait de donner son dernier sac de grains à ses poulets disait que s'il ne trouvait pas de quoi les alimenter d'ici 24 heures, ils se dévoreraient entre eux.
Et les humains ?

Jusqu'à maintenant, les Guadeloupéens se débrouillent. Ils utilisent ce qu'on appelle "le système D" mais il y a aussi certaines dérives de marché noir qui commencent et on a constaté des "hausses intempestives" dans certains commerces. (France-Antilles de ce jour).
Les grandes surfaces étant fermées, les lolos (petites épiceries) voient leur clientèle considérablement augmenter. Cependant ils risquent de ne plus pouvoir s'approvisionner ou se faire livrer dans les jours qui viennent faute d'essence.
Certains font jouer leurs réseaux de relations et arrivent à se procurer même une denrée aussi rare que l'essence. Une amie m'écrivait hier dans un mail : "Lorsque j'ai demandé au patron pêcheur qui nous faisait faire la traversée comment il arrivait encore à s'approvisionner en carburant il m'a répondu, avec un large sourire , "le carburant n'est pas un problème, j'ai des amis". Comme quoi, les pénuries d'essence n'affectent pas tout le monde!!! La grève peut durer très longtemps, il ne se fait aucun souci quant à son approvisionnement en carburant.
Il y a eu aussi des exactions contre des commerces. Par trois fois, le Super U de Chanzy à Pointe-à-Pitre a été obligé de fermer sous la menace d'une vingtaine de personnes disant être membres d'une organisation syndicale. Les clients ont été "invités" à partir sans payer.

Des négociations qui n'ont pas abouti


Beaucoup, dénoncent la méthode ou plutôt l'absence de méthode des négociations.
C'est le collectif LKP qui a exigé des réunions en assemblée plénière avec la présence de tous les partenaires de la négociation. Le préfet et certains élus avaient demandé de faire tout d'abord des groupes de travail pour discuter des différents points. Quand on voit le nombre de personnes présentes autour de la table (voir photo du post précédent), on comprend que cette configuration ne pouvait pas être productive. Le fait que les réunions aient été diffusées en direct par Télé Guadeloupe (RFO) et la chaîne locale Canal 10 ont eu un aspect de positif : la population a pu constater les enjeux de ce qui se passait. Le revers de la médaille est que ces réunions ont été jusqu'à présent essentiellement une tribune pour les élus qui s'adressaient à leurs électeurs potentiels et un tribunal où les accusés étaient les patrons, les élus et l'Etat ce qui n'a pas fait avancer la négociation.
Mercredi, après avoir lu le message d'Yves Jégo , secrétaire d'Etat à l'Outre-Mer, et les propositions du gouvernement, le préfet a quitté la réunion pour aller travailler avec son équipe en comité restreint. Cela a été très mal perçu par un grand nombre de Guadeloupéens qui pensent que le gouvernement refuse la négociation. On a pu voir des titres comme "Le préfet se défile".
A la suite de ce départ, le collectif LKP a demandé aux élus de transmettre leurs propositions par écrit afin de les analyser. Une prochaine rencontre est prévue samedi pour reprendre la négociation. Comme hier, une manifestation importante a lieu actuellement dans les rues de Pointe-à Pitre.Tout au long d’un parcours de plusieurs kilomètres, les manifestants scandent en chantant :
"La Gwadloup sé tan nou, la Gwadloup a pa ta yo : yo péké fè sa yo vlé an péyi an-nou" (La Guadeloupe nous appartient, elle ne leur appartient pas : ils ne feront pas ce qu’ils veulent dans notre pays)

Des jeunes s'expriment

On a vu la naissance d'un collectif de jeunes (Guadeloupe Alliance) qui ne se reconnaissent pas complètement dans ce qui se passe , craignent de devoir "payer les pots cassés" et veulent exprimer leur point de vue. Leur porte-parole, Gladys Démocrite, dit que le changement dont la Guadeloupe a besoin ne se règlera pas autour d'une table de négociations sous la pression d'un blocage. Cela nécessite la construction d'un projet pour la Guadeloupe qui demande imagination, réflexion, analyse, et "nous n'en voyons pas l'ombre". Des pistes comme "mettre en avant notre agriculture", "voir comment être auto-suffisant" ... sont données en exemple. A la question d'un éventuel changement du statut de la Guadeloupe, ces jeunes répondent qu'un tel changement doit servir à un projet. Ce n'est qu'une fois un projet établi qu'on pourra adopter le statut qui correspond à ce projet.

Voir aussi :
- une interview du leader du mouvement Elie Domota sur France-Antilles
- l'analyse d'un économiste et les commentaires des lecteurs sur Rue 89
- le site : Le petit lexique colonial où vous trouverez le texte du message d'Yves Jégo et les propositions de modification du plan de relance de la Région ( du 30-01-09)
- pour ceux qui vivent en Guadeloupe, Le Mika déchaîné , mensuel que l'on peut trouver en kiosque et qui apporte d'autres infos que celles du France-Antilles sur les disfonctionnements de la société guadeloupéenne.


mardi 27 janvier 2009

Quel avenir pour la Guadeloupe ?

Depuis mardi dernier, la Guadeloupe est paralysée par un mouvement de grève d'une grande ampleur : plus d'essence dans les cuves donc plus de transports, plus d'école, plus de commerces ouverts, des coupures d'électricité tournantes, des coupures d'eau. La plupart des entreprises et commerces qui n'avaient pas fermé ont été obligé de le faire par intimidation. Des dérapages ont lieu car les esprits s'échauffent et les voyous en profitent (poubelles et voitures brûlées, essence siphonnée, caillassage de voitures de pompiers...)
Les touristes qui ne sont pas repartis sont cloîtrés dans l'enceinte de leur hôtel où le ménage n'est pas fait et les bateaux de croisière ne s'arrêtent plus à Pointe-à-Pitre. Certains touristes se sont rendus dans les îles du sud comme les Saintes, qui ont du mal à gérer cet afflux de population à cause de l'absence d'approvisionnement.
Il est facile de bloquer une île : on l'a vu avec les barrages des routes lors du mouvement précédent. Actuellement la fermeture des postes d'essence obligent les gens à rester chez eux et l'activité ne tourne presque plus.
Le préfet a tenté en vain de réquisitionner 16 stations pour que la population puisse se ravitailler et exercer son droit de libre circulation. Il l'avait annoncé hier soir mais il a dû faire marche arrière face au refus des gérants qui disaient avoir reçu des menaces. Seules 13 stations sont ouvertes le matin et uniquement pour les véhicules prioritaires, sous contrôle des forces de l'ordre.


Qui est à l'origine du mouvement ?

Ce mouvement a été lancé à l'appel d'un collectif de syndicalistes "Liyannaj kont pwofitasyon" (LKP) dont le sens est "Rassemblement contre l'exploitation". Ce collectif regroupe une quarantaine d'organisations syndicales et politiques , ainsi que des associations militant pour l'identité créole, mais c'est l'UGTG (Union Générale des Travailleurs Guadeloupéens) qui a pris l'initiative de ce mouvement. Cette puissante organisation syndicale est bien connue pour les grèves dures qu'elle a menées en Guadeloupe et pour le fait qu'elle soutienne des idées indépendantistes. (Cependant Elie Domota, porte-parole du LKP, a tenu à préciser que le problème de statut de la Guadeloupe n'est pas à l'ordre du jour)
Le mouvement contre la cherté du coût de l'essence du 8 au 10 décembre qui avait bloqué la Guadeloupe pendant 3 jours avait été, lui, initié par un collectif d'entrepreneurs et avait pu sembler "couper l'herbe sous le pied" de l'UGTG qui avait de son côté prévu son action.

Comment ce mouvement est-il perçu ? La Guadeloupe est-elle en état de grève générale ou de paralysie générale ?

Lorsqu'on écoute les gens dans la rue, que l'on lit les nombreux commentaires sur les blogs et les sites, on ne peut que constater que la grève n'a pas le soutien de toute la population quoi que les médias en disent. Il est difficile de savoir si ce mouvement a véritablement le soutien de la majorité des Guadeloupéens.
Le mouvement précédent qui s'est terminé avec une baisse très sensible du coût l'essence a été perçue a postériori positivement par ceux qu'il n'avait pas trop gênés et qui voient les économies que cela leur permet de réaliser. Les gens autour de moi ont l'habitude des grèves dures qu'il y a eu dans le passé. Ils vont faire leurs réserves d'eau et de provisions et attendent que cela passe.
Cependant on entend et on lit des propos qui sont très sévères vis-à-vis du mouvement et qui n'émanent pas que du patronat : "population prise en otage", "macoutes de l'UGTG" (on en a vu intervenir cagoulés pour faire fermer les entreprises), "manipulation" d'une population en souffrance, "la Guadeloupe est mise à genoux".
Ce que je peux dire c'est qu'il est avéré que beaucoup d'entreprises ont été obligées de fermer, que l'intimidation existe et qu'il ne s'agit pas simplement d'un phénomène marginal. On parle aussi de pressions sur la presse écrite (France-Antilles), mais là je n'ai pas de témoignage direct.
De l'autre côté on trouve "une belle leçon de syndicalisme", "des hommes debout" ,"ils ont raison"...
Alors, qui intoxique qui ou encore qui est trompé par qui ?

Le problème de l'information

Les médias guadeloupéens, en particulier la chaîne locale Canal 10 qui couvre les événements sont acquis au mouvement. Les journalistes utilisent le "nous" en s'y associant, montrent dans leurs micro-trottoirs un petit peuple courageux qui tient bon dans l'adversité et se débrouille pour trouver des fruits et des légumes à mettre dans son panier et le directeur de la chaîne intervient lui-même pour encourager ce qui se passe. Qu'une chaîne ou une radio donne une info partisane n'est pas en soi un problème s'il existe d'autres sources d'information. Ce qui est plus que gênant c'est que l'on trouve avec difficulté une information qui ne soit pas univoque . Comme pour le mouvement de décembre, l'information a été lente à arriver et l'on manquait cruellement d'analyse journalistique véritable surtout au début alors que c'est à ce moment-là qu'elle est la plus nécessaire. Après ce temps de retard, on peut trouver à présent davantage d' informations sur France-Antilles. Les gens s'échangent des liens et Internet heureusement apporte plus d'éléments. Cependant il faut garder à l'esprit que tout le monde n'a pas Internet et que les médias qui apportent l'info à la plus grand partie de la population sont la radio et la télévision.

Quelles revendications ?

Les revendications de LKP sont multiples et de plusieurs ordres. Sur les 120 demandes formulées au départ (passées à 123 depuis , et maintenant 146), les revendications dont on entend beaucoup parler actuellement sont :
- Une nouvelle baisse du prix des carburants.
- L'arrêt des installations "anarchiques" de nouvelles stations d'essence et de plus automatisées - en Guadeloupe on a encore un service à la pompe - qui feront de l'ombre aux stations existantes et disparaître les emplois de pompistes (donc refus de la concurrence dans ce domaine).
- La baisse du coût de la vie qui est beaucoup plus chère en Guadeloupe qu'en métropole notamment la baisse des prix des produits de première nécessité, des impôts et des taxes.
- La revalorisation du SMIC et des bas salaires de 200 € par mois.
Et puis il y a de nombreux autres points qui abordent des problème sociétaux, économiques et politiques . Vous pouvez en trouver le détail ici, dans la plateforme de revendications.



Séance de négociations diffusée en direct et in extenso sur RFO Guadeloupe
(cliquer pour agrandir)

Vers des négociations ?

Pour le moment on peut difficilement parler de négociations. Ce sont plutôt des exigences posées par le collectif.
Une première réunion a eu lieu samedi dernier : 5 heures de tractations laborieuses et de discours des uns et des autres pour ne pas réussir à conclure un protocole pour le déroulement des négociations. Hier, lundi, la réunion a commencé avec une heure de retard car le collectif se faisait attendre. A la table des négociations, les élus, les représentants du collectif, de l'Etat, dont bien sûr le Préfet, les socioprofessionnels. C'est le président de l'Association des maires qui est le président de séance. Beaucoup de monde autour de la table. Plus de 5 heures d'échanges sans aboutir à une négociation sur un seul point. Rebelote ce soir avec un peu plus d'avancées. Les mécanismes des taxes sont passés en revue et de nombreux points abordés : indice des prix, minimas sociaux, allocations handicapés...
Aucune conclusion cependant car les réponses à la plupart des questions passent par l'Etat, et donc par la métropole, ce que certains ne manquent pas de pointer du doigt. Le collectif exige des réponses immédiates à des exigences importantes qui, si leur bien-fondé n'est pas discutable (revalorisation des bas salaires par exemple), demande de la réflexion pour être mises en place sans couler l'économie guadeloupéenne. L'argument imparable du collectif est que l'Etat a bien su trouver l'argent pour sauver les banques.
Un appel à une trêve dans la grève par le préfet a reçu un non catégorique par le porte-parole du mouvement, Elie Domota. On peut s'interroger sur la durée et l'issue du conflit. Les revendications (30 points prioritaires ont été dégagés) qui n'ont pas reçu une réponse positive appelleront à un maintien et un renforcement de la grève.
Hier soir à la fin de la séance, Elie Domota a menacé : si nous n'avons pas de réponses positives à nos revendications cela se passera dans la rue.
C'est une façon de mettre de la pression. Ce qui est à craindre est le dérapage de la situation. Domota a évoqué Mai 67 et certains manifestants portent des t-shirts sur lesquels figurent cette date. Ce mouvement s'était soldé par des morts.

Les inquiétudes sont vives :
A qui va profiter ce mouvement ?
La conscience politique et citoyenne des Guadeloupéens en sortira-t-elle grandie ?
la Guadeloupe qui avait amorcé des progrès en matière d'accueil au tourisme, une de ses richesses principales, s'en relèvera-t-elle ?

Le problème du statut de la Guadeloupe

Le statut de la Guadeloupe n'est pas à l'ordre du jour mais il sera forcément soulevé lors de l'examen du premier point du 4eme chapitre de la plateforme qui demande la priorité d'embauche pour les Guadeloupéens.
Cette exigence est contraire à l'idéal républicain d'égalité qui régit notre constitution. Elle est inacceptable puisque la Guadeloupe est un département français d'Outre-Mer depuis la loi du 19 mars 1946. Lors du référendum du 7 décembre 2003, les Guadeloupéens qui ont exprimé leur suffrage ont refusé à 72,98 % un changement pour un statut leur donnant davantage d'autonomie.
Comme dans tous les DOM, tous les textes législatifs nationaux y sont applicables. Cependant ils peuvent faire l'objet de mesures d'adaptation "nécessitées par leur situation particulière" ( article 73 de la Constitution). L'article 74 dit " des mesures justifiées par les nécessités locales peuvent être prises par la collectivité en faveur de sa population en matière d'accès à l'emploi, de droit d'établissement pour l'exercice d'une activité professionnelle ou de protection de patrimoine foncier." Ces 2 articles ne suffisent pas au collectif.
"La société guadeloupéenne est toujours basée sur des rapports de classe et des rapports de race. Comme en 1967..." dit Domota qui porte un T shirt sur lequel est inscrit le slogan "La Gwadloup sé tan nou".

... ce sujet demanderait à être développé ce que je ne ferai pas dans ce post.
Ce qui est à déplorer c'est la reprise de slogans racistes (heureusement par une minorité) alors qu'on est en 2009 à l'heure où la planète entière a vibré à l'élection d'Obama.
Allez voir aussi les éditos de Carib Creole One.

Ce mouvement révèle de profondes difficultés de la Guadeloupe. La métropole connaît aussi les problèmes de chômage, de spéculations financières, de politiques véreux, de dessous de table, de rémunérations mirobolantes alors que beaucoup sont sous le seuil de pauvreté, de drogue, d'absence de perspective d'avenir pour les jeunes.. mais ici, ils sont encore accrus .
Quelle Guadeloupe voulons-nous ? est la question qu'adresse Ernest Pépin dans un texte sévère destiné à susciter le débat : Quelle leçon tirer de Barack Obama ?



lundi 19 janvier 2009

Corps et arbres


Quelles nouvelles découvertes durant la semaine qui vient de s'écouler ?

Et bien, tout d'abord, j'ai eu la chance de participer à un stage intensif de dessin sous la direction de l'artiste peintre Catherine Pugliesi-Conti. Le sujet en était "le corps humain" et notre modèle Loulou a bien posé pour nous. Nous étions 9 participantes et l'atelier se passait sur la terrasse de Catherine, entourée de verdure et de fleurs, à la lisière de la forêt tropicale humide.

Nous avons d'abord appris que le canon du corps idéal, c'est-à-dire le rapport des proportions à partir d'une même mesure de base est de 8 têtes : on compte 4 têtes jusqu'au bassin et 4 jusqu'aux pieds. Notre modèle était bien "canon" !
Grosso modo une jambe mesure donc 4 têtes et un bras avec main tendue est de longueur équivalente à une jambe sans le pied.
Le canon d'un personne de la vie courante, genre "paysan un peu trapu" (le cliché !) est plutôt de 7 têtes et demie et nous avons aussi pointé les différences homme/femme. Le soir , en rentrant dans nos foyers, nous avons testé ces vérités sur les personnes que nous avions sous la main...

Puis nous avons fait des gammes : dessins avec échelles, puis sans, silhouettes simplifiées ("fil de fer") en marquant les axes colonne/ épaules/bassins, dessins de pieds, de mains, de bras, de jambes, attaches pieds-chevilles, mains-poignets, genoux, cou, bassin, raccourcis (représenter l'objet tel qu'on le voit) et tracé des "emmanchements" pour les faire sentir.
Pour ce faire, nous avons testé différents outils : crayon comté, mine de plomb, fusain, crayon bille, pastel gras, pierre noire, craie et puis encre bistre, noire de chine, brou de noix que nous pouvions déposer à l'aide d'un pinceau, d'une plume, d'un bambou taillé et même d'une brindille. Cette dernière technique que j'ai expérimentée pour la première fois m'a beaucoup plu car elle permet un tracé souple, fin et sensible.
Ensuite il a fallu dessiner notre modèle, sous des angles et positions variés, sans lever notre crayon de la feuille, puis sans regarder notre feuille, avec la main gauche, avec les 2 mains en même temps et sans lever le crayon, avec le bras tendu ... on pouvait se demander jusqu'où cela nous mènerait ! Le résultat provoquait parfois de grands éclats de rire.
Et bien, au bout des 5 jours du stage, nous arrivions toutes à dessiner notre modèle à main levée avec les bonnes proportions !


Des belles proportions, nous en avons aussi trouvées dans les arbres du jardin botanique de Basse-Terre (waouh, la transition !).
C'était samedi dernier et la visite était organisée par l'association "Les vieilles maisons de Guadeloupe".
Le jardin botanique de Basse-Terre, que l'on peut visiter librement, est le plus ancien jardin botanique de Guadeloupe. C'est dès 1820 que l'habitation Saint-Charles fut le lieu d'essais d'agriculture dans le cadre d'un jardin botanique d'acclimatation. Le jardin connut l'abandon pendant une vingtaine d'années jusqu'en 2003 avant de faire l'objet d'un projet de réhabilitation. Le conseil général, qui en est propriétaire, en a confié actuellement la gestion au Conservatoire Botanique des Antilles Françaises. Jean-Marie Flower, qui nous guidait pendant la visite, en est le directeur pour la Guadeloupe. Ce Conservatoire est une association dont les missions sont la connaissance, l'expertise et la protection des espèces végétales en y ajoutant la sensibilisation et l'information en direction du grand public. Ce sont les espèces autochtones qui sont privilégiées dans le jardin. On les trouve dans leur habitat naturel qui couvre 20 % de la Guadeloupe et certaines de ces espèces doivent être protégées.



A gauche "Bonnet d'évêque" (photo de Françoise)



Notre intervenant, passionné par son sujet, nous a transmis quelques notions au cours de cette visite.
En voici trois :

- La dénomination d'une plante comporte 2 parties, le genre et l'espèce. Les genres proches sont rassemblés dans des familles.
Par exemple le "mahogany petites feuilles" swietenia mahogani appartient au genre "swietenia"(connu sous le nom d' "acajou"), à l'espèce "mahogani". Le "mahogany grandes feuilles" s'appelle ainsi : swietenia macrophylla. Tous 2 appartiennent à la famille des méliacées.

- Les plantes hémiépiphytes :
Nous rencontrons de nombreuses plantes hépiphytes au cours de nos marches en forêt . Elles utilisent les arbres comme support sans en être parasites (les orchidées, par exemple).
Qu'en est-il des "hémiépiphytes" ? Notre conférencier nous a montré un feuillage plus foncé au milieu des branches d'un teck. Il s'agissait d'un figuier. Les graines ont été transportées par les oiseaux. Le figuier va se développer en lançant ses racines vers le sol. Celles-ci peuvent à la longue se lignifier et se rejoindre pour former un véritable tronc autour de la plante hôte dont la croissance est arrêtée.

- La durée de vie d'une plante est très importante . J-M Flower a évoqué une plante herbacée qui s'est maintenue de façon végétative depuis 40000 ans en Nouvelle-Zélande. En Norvège, un genévrier a pu être daté de 9000 ans grâce aux fruits fossilisés trouvés à sa base. Cette longévité s'explique parce que les plantes , à la différence des humains, changent leur ADN pour s'adapter aux transformations de leur environnement. (cf. Eloge de la plante, 1999, et Plaidoyer pour l'arbre, 2005 , Francis Hallé)


Fleur de "Boulet de canon" (photo de Françoise)

L'arbre "boulet de canon" (Couroupita guianensis), originaire de Guyane, tire son nom de ses gros fruits sphériques, matures au bout de 18 mois et qui mettent plus de 2 ans à se détacher de l'arbre (...ne pas se trouver en dessous à ce moment-là !). Les fleurs parfumées poussent directement sur le tronc en partie basse de l'arbre. Il n'existe que quelques spécimens en Guadeloupe.


dimanche 11 janvier 2009

La "pas possible"


Donc, soirée du 31 à l'habitation Matouba. Ce fut le lieu d'expériences culinaires inédites.

En effet Michel, qui y séjournait, avait fait le marché à Basse-Terre et avait rapporté, en plus de délicieuses tranches de thon, des "pas possible".
Il est de tradition en Guadeloupe, lors des fêtes de Noël et de fin d'année, de manger certains légumes pays. La "pas possible" en fait partie. C'est une variété d'igname, comme le" couscouch". Je n'ai pas de photo mais cela ressemble à de toutes petites pommes de terre de couleur grise.
Dans son livre de recettes Tendacayou, une table d'hôtes aux Antilles (p 153), Sylvie Clément indique :
"Bien qu'encore cultivés par quelques anciens, il devient hélas de plus en plus difficile de trouver des ignames "pas possible" en Guadeloupe. Leur chair fine et sucrée est un vrai régal ! Cuit à l'eau salée, puis coupé en deux, "l'igname pas possible"se sert avec une noisette de beurre, tout simplement. Un vrai bonheur !"
Nous autres, pauvres béotiens, avons peiné à éplucher ces petits tubercules qui nous amidonnaient les mains (c'était pas d' la tarte ! ) et nous ne savions pas combien ce met était précieux. Nous l'avons découvert en le dégustant ... merci Michel !

Autre légume pays, le pois de bois ou pois d'angole peut y être associé lors des repas de fête.
Et c'est ce que nous fîmes ... mais sans en connaître de recette . A présent, je vous en livre une pour vos futurs essais culinaires.


Pour 4 à 5 personnes, il faut, 500 g de pois d'angole, un morceau de giraumon, 100 g de lard fumé, 1 oignon, 1 bouquet garni (persil, cive, thym, feuilles de bois d'inde), 2 gousses d'ail, huile, sel , poivre, clous de girofle. Faire blanchir 5 mn et égoutter les pois écossés. Blanchir le lard coupé en petits dés. Dans une cocotte, verser 2 cuillères d'huile et faire revenir les lardons, l'oignon pays (cive) haché, l'oignon émincé, l'ail écrasé, le giraumon en morceaux. Verser les pois et faire revenir 5 mn. Recouvrir d'eau, saler, poivrer. Ajouter les clous de girofle, le thym et laisser cuire pendant une heure avec le couvercle. Terminer la cuisson à découvert pour réduire le liquide afin d'obtenir un mélange crémeux...

Les Métros pourront certainement trouver des pois d'angole secs ou congelés dans des magasins spécialisés.


Pois d'angole dans le jardin d'Isabelle (cliquer pour agrandir)

Les pois d'angole poussent sur un arbuste qui peut atteindre 3 m de haut. Ils ont été importés d'Afrique par les bateaux négriers. (cf. Le Père Labat, Nouveau Voyage aux isles Françoises de l'Amérique, 1722)

Enfin, Do a voulu nous initier aux gombos, qui viennent d'une plante elle aussi originaire d'Afrique. Son fruit, cueilli vert, a l'aspect d'une petite corne allongée et a une texture gélatineuse ("mucilagineuse"). Il peut être consommé cru ou cuit, en légume ou en condiment, et entre dans la préparation de sauces et de soupes. Il faut le laver en le frottant pour retirer son duvet et ne pas trop le faire cuire. Lui aussi aurait mérité d'être cuisiné avec un savoir-faire que nous ne possédions pas. Il nous reste encore beaucoup à apprendre, pas possible !






Ce fut donc un vrai beau réveillon antillais dans un lieu exceptionnel !







samedi 10 janvier 2009

Bon lanné !

Notre petit araucaria de Noël qui peut devenir grand


D'aucuns s'impatientent : comment, rien depuis la "levée de barrages" et nous sommes le 10 janvier. Ne s'est-il rien passé depuis ?

Et si, et même beaucoup de choses... ce qui explique que l'emploi du temps fut chargé.
Une dizaine de jours ont filé comme un rêve en métropole pour fêter Noël en famille sous des climats plus hivernaux en Champagne et à Paris. Le temps de voir aussi la belle exposition Dufy au musée d'Art moderne, le dernier film d'Agnès Varda : Les plages d'Agnès et les arbres des Champs Elysées d'où pleuvaient des gouttes de lumière.


Ensuite Alain et Catherine nous ont rejoints en Gwada et nous avons eu le plaisir de les accompagner dans leur découverte (ou re-découverte) de la Guadeloupe.
Ils n'avaient pas oublié leurs chaussures de randonnée et un temps très agréable nous a permis de faire de belles balades : la 1ère chute du Carbet, avec la rituelle douche froide pour les plus courageux, la plage de Saint-Félix (bien sûr!), la visite de la Grivelière, l'expérience inoubliable de la traversée vers Les Saintes sur Wapayou et le sentier de Terre de Bas, le restau du rocher de Malendure, le café dans le merveilleux site de la caféière Beauséjour, un bain à Petite Anse, le petit port de Deshaies... sans oublier l'ascension de la Soufrière. Pour cette marche nous étions un bon groupe (16) , sans malheureusement Do qui travaillait, le pauvre ! et nous n'étions pas les seuls. En effet c'était le mardi 30 décembre et la Soufrière est restée exceptionnellement dégagée durant toute la journée ainsi que le mercredi 31 (fait suffisamment rare pour être noté dans nos tablettes).



Seul un léger nuage caresse le sommet en fin d'après-midi du 31 décembre.




Vue du sommet le 30 décembre : en second plan l'ancien cratère de la Citerne, au loin l'archipel des Saintes puis la Dominique. Enfin, tout à fait à l'arrière-plan, derrière la Dominique, on pouvait voir se profiler la Martinique.



En regardant vers le nord-ouest, le panache de fumée plus abondant qu'à l'ordinaire signale l'activité importante du volcan de Montserrat qui montre un regain d'activité depuis le 2 décembre.



Le passage à l'année nouvelle fut fêté sur la belle terrasse de l'Habitation Matouba.




Tout moun bon lanné 2009 !!!